Cet album publié en 2014 sonne comme en 1966/67. Les quatre vagabonds folkeux d’Allah Las ont parfaitement assimilé et digéré leur vieux grimoire West Coast. Guitare douze cordes en bandoulière, banjo, vibraphone, basse, maracas, tambourin, percussions discrètes, la panoplie instrumentale est simple mais terriblement bien amenée. Cet album est fait pour réchauffer les cœurs, il sent bon le bois fumé, les flammes qui crépitent, le sable chaud de Venice Beach, le bikini et le rhum ambré. Un polaroïd vintage d’une époque California sixties à l’âge d’or révolu. Révolu mais pas éteint.
Le quartette californien a longtemps traficoté ses petites sérénades folks blues pop dans son coin (cf. le premier album éponyme) avant de nous les offrir sur un plateau d’argent. Dans le breuvage qui alimente ce deuxième opus, on y trouve :
• Un zeste de Love : “De vida voz”, “Follow you down”
• Un soupçon de Lee Marvers de The La’s : “Had it all”
• Un double nappage Brian Jonestone Massacre/Dandy Wahrols : “Artifact”, “Yemeni Jade” on the rocks
• Quelques arômes de Donovan & Bob Dylan : “501-415”, “Nothing to hide”
• Et une goutte de Fairport Convention : “Worship the sun”
• Le tout mixé au shaker d’Harry Nilsson et sous l’œil averti des tauliers du bar The Byrds : “Recurring”, “Buffalo Nickel”, “Better than mine”
En matière de bons goûts, on sait difficilement faire mieux. Un régal pour les papilles. Avec le petit supplément surf music agrémentant le tout : les deux instrumentales parfaitement concoctées et soignées sur “Ferus Gallery” et “Yemeni Jade”. Le spectre de Joe Meek hante avec délice la production du disque (éminent producteur anglais du début des sixties pour Shirley Bassey, Tornadoes, Gene Vincent, Petula Clark,…)
Album produit sous la houlette de Nick Waterhouse, on sent bien que les quatre Huckleburry Finn de service ont le souci du détail, de la capture à l’ancienne du son des instruments. Un peu de réverbe ici ou là pour amplifier la pureté carillonnante de la douze cordes et conférer un climat caverneux au chant et aux chœurs. Du vibrato/tremolo dans les guitares. Quelque effet twang passé au moulinet. Le tour est joué. Facile ? Non loin de là. Minimaliser la production et les arrangements est un art. Une science à part entière. Et le groupe joue avec le bon feeling. Le modjo est là. Ca claque, ça swingue à l’arrière du combi Volkswagen. Et sans prévenir, les quatre troubadours réalisent un album idéal de bout en bout. Un admirable compagnon de voyage.
L’album révélation de l’année 2014 en ce qui me concerne. Le disque parfait. Amen.